Vendredi 4 Novembre 2016
Pauline Prod'homme

Née à Maisons Laffitte, elle a fait ses premiers pas dans l’écurie familiale. Peut être qu’elle a même du monter à cheval avant de savoir courir … Elle connait les hippodromes comme sa poche et rêve déjà de devenir entraineur. Mais ne vous y prenez pas, ce n’est pas tout à fait pour faire comme papa, c’est parce que c’était évident. Evident de continuer la construction de toute une vie, celle de sa famille. Ses parents l’ont toujours soutenu, ou peut être qu’ils n’avaient pas trop le choix face à la détermination de leur fille ...

Elle apprendra les bases de l’équitation au centre équestre et puis : « du jour au lendemain, je me revois encore dans l’escalier à la maison, j’avais à peine 12 ans, je me suis dit que je ne retournerai plus jamais au poney club ! »
Pauline a donc pris ses quartiers dans les écuries aux cotés de Didier Prod’homme. Elle sera donc, dans un premier temps, cavalière amateur. Elle jongle entre l’école et l’entrainement. Mais les salles de classe ne sont pas son endroit favori, elle n’aime pas être enfermée et ne tient pas assise sur une chaise, elle préfère évidement être assise, en selle, sur un cheval.
Après des études de comptabilité, les victoires s’enchainent, elle perd sa décharge et devient jockey professionnel(le).

Les années passent et elle repousse à chaque session son inscription au pré-stage pour passer sa licence d’entraineur … « je gagnais en course, alors j’ai pris mon temps, je laissais trainer … et puis ça m’a pris. J’avais quelques jours pour rassembler toutes les pièces du dossier ! » C’était mi décembre 2015 et elle est devenue officiellement entraineur en juillet dernier. Mais finalement son quotidien ne change pas vraiment, "entraîner" elle l’a quasiment toujours fait aux cotés de Didier. Tout est bien orchestré dans le binôme père - fille !

Le quotidien de la jeune femme n’a rien de classique. Mais la routine, aussi extravagante qu’elle puisse paraitre pour quelqu’un qui n’est pas du milieu, est nécessaire … pour tout caser en 24H.
La journée commence à 5H30, bienvenue dans le monde des courses ! Aux écuries à 6H, elle fait les boxes (comme toute le monde) qui lui sont attitrés. « je vérifie toujours tout, je suis exigeante, c’est vrai » dit elle avec un sourire angélique … puis 3 ou 4 lots chaque matin. « Je prépare le travail des chevaux, je fais les lots, je suis toujours à cheval, mon père regarde l’entraînement à pieds, et s’occupe des engagements et des propriétaires. Le travail est bien réparti entre nous deux. C’est un échange. Tout coule de source, nous avons la même vision des choses, il n’y a jamais de mésentente. " Puis départ aux courses, un tour au sauna, et elle chausse ses bottes ou bien endosse sa casquette d’entraineur. Retour pour l’écurie du soir et extinction des feux vers 22H… et on recommence le lendemain, 6 jours par semaine. Elle avoue apprécier une sieste de temps en temps ...

Elle parle de son double métier de jockey/entraineur comme un métier - passion. Elle est consciente de la discipline qu’il nécessite mais sait qu’elle a de la chance, car « si tu es sérieux, bosseur, avec une pincée de talent, tu réussis. C’est vraiment un métier sympa »
Mais comment se projette -t-elle dans ce monde d’hommes ? : « Je ne vois aucune différence, le métier est le même. Il y a trop de préjugés, les femmes en arrivent à s’auto dévaloriser .. nous devrions être sur le même pied d’égalité que les hommes. Nous avons moins de force c’est vrai, mais nous possédons bien d’autres atouts qui nous permettent de rivaliser bien plus tactiquement en course par exemple. »

Son exigence et son sérieux lui offrent, en tant que jockey, une cravache d'honneur lors de la Cérémonie des Cravaches d'Or cette année, 76 victoires en plat, 1 en obstacle, 2 en trot attelé, et 8 en trot monté … il ne lui manque plus qu’une victoire à Auteuil pour éventuellement arrêter de monter en course … Pauline Prod’homme est donc la seule femme et surement la seule jockey à avoir remporté une course dans toutes les disciplines. Seul le crack jockey Christophe Soumillon peut rivaliser avec elle, mais il lui manque une victoire en trot monté. On lui souhaite le meilleur en tant qu’entraineur.

Une pensée particulière à son cheval DA PAOLINO avait qui elle avait gagné le quinté le jour du Prix de Diane édition 2012. Un partenaire brut (une pommette fracturée, la veille de Noël) mais gentil, qu’elle a formé tous les matins et qu’elle a été la seule à monter en course. Aujourd’hui à la retraite, elle se souvient de lui comme sa plus belle victoire.

Propos recueillis par Carole Desmetz​