Vendredi 11 Mars 2011
matthieu-autier

Il a dû patienter, avant de montrer ce dont il était capable, lui qui fêtera ses 20 ans le 27 juin prochain. Mais, avec 5 victoires et de nombreuses places depuis le début de la saison, Matthieu Autier se révèle de plus en plus… Et, derrière l’apprenti prometteur se cache un jeune homme sensible et un amateur… d’art !

De quelle région venez-vous ?

Bordeaux.

Des parents dans le métier ?

Pas du tout. Mon père est architecte, et ma mère secrétaire. Rien à voir.

Alors, comment en êtes-vous arrivé là ?

J’ai toujours adoré les animaux. Tous les animaux. Gamin, je voulais devenir vétérinaire, il m’arrivait de rêver partir en Afrique, pour m’occuper des grands singes, voir du pays, au travers de ma profession… Mais, à cet âge là, on n’a pas encore d’idées bien précises. Plus tard, j’ai pris conscience que pour devenir vétérinaire, il fallait suivre des études spécialisées pendant plus de 7 ans, au minimum. Or, même si je n’étais pas mauvais du tout, à l’école – j’avais 13 de moyenne -, je n’aimais pas beaucoup. M’orienter vers une voie professionnelle me plaisait, et me correspondait, davantage. Beaucoup d’étudiants, après des années de spécialisation, ne trouvent pas de boulot, de nos jours…

Et comment a germé l’idée de vous muer en jockey ?

Je m’étais rendu à un « Forum des Carrières », à Bordeaux, et je me suis retrouvé nez à nez avec le directeur de l’école AFASEC de Mont-de-Marsan. Nous avons parlé. Je lui ai dit que je n’étais jamais monté à cheval, si ce n’est, tout gosse, sur un poney de promenade. Il m’a répondu : « C’est très bien, comme ça, tu n’as pas pris de défauts… »

L’AFASEC, donc…

Oui. Mon gabarit s’y prêtait.

Difficiles, les premières leçons « d’équitation » ?

Pas vraiment. Je ne vais pas vous dire que j’avais ça dans le sang, mais j’ai rapidement trouvé l’équilibre, assez vite senti « la main ».

Qui, pour maître d’apprentissage ?

Jean-Claude Rouget. On peut plus mal tomber, évidemment, mais il ne m’a jamais aligné au départ d’une compétition. Au bout de deux ans, le jour de mes 17 ans, j’ai signé un contrat pour être salarié, chez lui. Mais je restais toujours à l’écurie. Un « permis d’entraîner » m’avait fait débuter, à Mont-de-Marsan – ma seule sortie -,  mais je ne me voyais pas rester dans cette situation éternellement. J’ai décidé de « monter » à Paris. J’ai pris mon téléphone, et Richard Gibson a accepté de me prendre à son service. J’ai quitté Jean-Claude Rouget en janvier 2009, mais je ne voulais pas perdre de temps, je voulais travailler tout de suite. Le 1er février 2009, je débarquais à Chantilly.

Dur, cet « exil » ?

Davantage pour mes parents, et particulièrement ma mère, sans doute. Je partais un peu à l’aventure, « loin », je n’avais pas 18 ans… Mais ils m’ont toujours laissé libre de mes choix et, moi, je savais ce que je voulais. Et, même si je suis très content à chaque fois que je les revois, j’avais déjà une certaine forme d’indépendance.

Chez Richard Gibson ?

J’ai beaucoup appris, bien sûr, et il m’a confié certains de ses représentants, en province. Mais je voulais progresser, et qui dit progresser dit se mettre en selle souvent… Je ne montais pas assez, à mon goût, et, en juillet 2010, j’ai rejoint l’écurie de Mathieu Boutin.

Un grand formateur…

Oui. Je m’en aperçois au quotidien.

Savez-vous qu’il y a quelques années, il a fait « éclore » un certain Christophe Soumillon ?

Bien sûr. Christophe est un peu mon « idole », quelque part. Mais je n’en suis pas là. J’en suis loin, même.

Tout se passe bien, chez Mathieu ?

Oui. Il me fait confiance, je monte régulièrement, pour lui et pour quelques autres entraîneurs, comme Corine Barande-Barbe, Jean-Marc Capitte, ou Tony Castanheira. Je commence à être demandé, pour les épreuves réservées aux apprentis.

Avez-vous un agent ?

Oui. Stéphanie Grohard, qui s’est lancée en même temps que Thomas Messina…

Vous disiez que « Soumi » était votre idole… Est-ce votre « modèle », ou en avez-vous d’autres ?

Je n’ai pas vraiment de « modèle ». Je demande beaucoup de conseils à Olivier Peslier. Sylvain Ruis, Ioritz Mendizabal, pour ne citer qu’eux, ont beaucoup de talent, sans parler de Christophe, bien sûr. J’essaye de « prendre » ce qu’il y a de meilleur chez chacun d’eux.

Vous êtes très léger…

Je mesure 1 mètre 58, pour 51 kilos, sans régime. Avec un petit effort, je peux me mettre en selle à 51,5. Mais, de toute façon, mon patron, qui a tant souffert de ses problèmes de poids, quand il était jockey, m’interdit d’accepter de trop petits « bottom weights ».

Combien de succès, en tout ?

23. Il y a encore du chemin à faire…

Vos objectifs, pour 2011 ?

Il faut savoir se fixer des buts… atteignables ! Si j’atteignais les 30 gagnants dans l’année, ce serait bien. Remporter un quinté est aussi dans le domaine du possible. Dans ce type de course, nous, apprentis, n’avons pas le droit à la décharge. Battre les « vrais jockeys », à armes égales, est valorisant, d’autant que les « événements » sont médiatisés. En poussant le bouchon un peu plus loin, une listed Race serait formidable…

Aimez-vous d’autres sports ?

Mon sport, c’est l’hippisme. Ensuite, j’apprécie les jeux de raquettes, comme le tennis. Le foot, beaucoup moins…

D’autres passions ?

La peinture. Depuis 5 ou 6 ans, je fais des aquarelles. Je me mets complètement dedans. C’est excellent pour mon mental. Malheureusement – ou heureusement, d’un autre côte – je n’ai plus trop de temps pour m’y consacrer.

Que peignez-vous ?

A votre avis ? Principalement des chevaux, des jockeys… Christophe Soumillon a d’ailleurs une de mes toiles, chez lui.

Fiancé ?

Non. Célibataire.

Vous vivez donc seul ?

Oui. Dans un studio, à Lamorlaye.

Vous préparez vous-même vos repas ?

Non. Je suis souvent invité chez des amis, ou nous grignotons au restaurant. J’ai horreur d’être seul. Sauf… quand je peins ! Là, j’ai besoin de cette solitude.

On traite de « peintres » les "mauvais" jockeys… Ce Matthieu là a tout pour devenir… un artiste !